L’Union européenne, les Etats-Unis et la Chine signent une première déclaration mondiale sur les risques de l’intelligence artificielle pour l’humanité
Les mercredi 1er et jeudi 2 novembre 2023, le premier sommet mondial sur la sécurité de l’intelligence artificielle (IA) a eu lieu à Bletchley Park, en périphérie de Londres, au Royaume-Uni. De nombreux dirigeants mondiaux, dont ceux de l’Union européenne, des Etats-Unis et de la Chine, se sont mis d’accord pour effectuer une déclaration commune sur les dangers d’un développement non contrôlé de l’IA.
Un développement de l’IA dangereux pour l’humanité ?
Ce sommet, inédit sur le sujet, a vu l’adoption d’un texte portant le nom de « Déclaration de Bletchley » permettant d’attester pour la première fois que « le monde se réunit pour identifier le problème et mettre en avant ses opportunités » selon la ministre britannique de la Technologie, Michelle Donelan. La mise en avant de l’urgence de comprendre et de gérer collectivement l’IA semble être une première étape vers la constitution d’un effort généralisé pour garantir la sûreté du développement et de la diffusion de l’IA. L’enjeu, selon la déclaration, étant d’identifier les risques communs et de déployer des politiques transnationales pour les atténuer. Néanmoins, le cadre du sommet fut critiqué – dans une lettre ouverte d’une centaine d’organisations, experts et militants internationaux, tel qu’Amnesty International ou la Confédération européenne des syndicats – pour son aspect à ‘huis clos’ avec la représentation massive des géants de la tech et le faible accès offert aux membres de la société civile.
Ce sommet, pouvant être interprété comme une première prise de conscience générale, intervient dans un contexte d’alertes sur les dangers de l’IA. Au début du mois d’avril, une lettre ouverte signée par un millier d’experts demandait une pause de six mois sur les recherches en cours afin d’élaborer des régulations pour ces logiciels, jugés « dangereux pour l’humanité ». Elle était notamment signée par Yoshua Bengio ou Elon Musk, PDG de Tesla et cofondateur d’OpenAI. Plus encore, Geoffrey Hinton, pionnier de l’IA notamment conversationnelle et créatrice d’image, a démissionné en mai dernier de Google pour alerter sur ces dangers. Il a affirmé que les perspectives sont « plutôt effrayantes » (BBC) et qu’« une part de lui-même regrette l’œuvre de sa vie ». Ces nombreuses remarques témoignent d’une préoccupation ambiante dans le monde de l’IA.
Quelle coopération internationale sur un sujet toujours plus préoccupant ?
En effet, le sujet de l’intelligence artificielle prend de plus en plus de place dans l’actualité liée à une concurrence exacerbée dans le secteur et la mise en service de nouvelles plateformes ouvertes au grand public ces derniers mois. De même, les progrès fulgurants de l’IA sont alimentés par les investissements massifs des géants du numériques tel que Microsoft dans OpenAI, ou bien Google et Meta qui développent leurs propres outils. De plus, la menace de disparition massive d’emplois est une des raisons de l’appel au contrôle de l’IA. Les plateformes logistiques se robotisent progressivement ainsi que d’autres métiers, menaçant environ 300 millions d’emplois dans le monde. D'autres postes sont menacés, alors que le logiciel ChatGPT est capable d'écrire des synthèses, des comptes-rendus et des articles. Les capacités de calcul et d'invention de l'intelligence artificielle sont nourries par l'infini quantité de données publiées sur Internet. Au niveau européen, Věra Jourová, commissaire européenne chargée des Valeurs et de la Transparence était présente pour représenter les intérêts de l’UE, et affirmait que les Etats membres “travaillent sur leur propre législation en matière d’intelligence artificielle depuis trois ans […] qui vise à élaborer un ensemble de principes pour la régulation [de l’IA], ainsi qu’à introduire des règles pour des technologies spécifiques telles que la reconnaissance faciale en temps réel” (The Guardian). La réunion des hauts responsables politiques est l’occasion, pour le Royaume-Uni, de convaincre de créer un groupe d’experts sur l’IA sur le modèle du GIEC pour le climat. Les objectifs finaux du sommet étaient tournés vers l’avenir avec l’annonce de la poursuite des discussions mondiales sur le long terme. En outre, la Corée du Sud et la France accueilleront les deux prochains sommets – respectivement dans six mois et un an.