L’Union européenne, pionnière sur l’intelligence artificielle ?
Le Cadre européen pour l’intelligence artificielle (IA) s’apprête à entrer en vigueur. Le trois octobre, un trilogue a permis d’en acter les grands principes. L’Union européen souhaite devenir la pionnière sur la règlementation des systèmes d’intelligence artificielle.
L’ère de l’intelligence artificielle est ouverte et avec elle, une course contre-la-montre pour la maîtrise de cette technologie et pour s’en protéger. L’intelligence artificielle, dont les potentialités sont encore largement inexploitées et les applications immenses suscite un déploiement de moyens financiers de plus en plus importants pour développer des systèmes les plus performants possibles. Les enjeux économiques, sociaux, éthiques et moraux de l’IA pourraient déstabiliser l’équilibre géopolitique mondial et composer une donne nouvelle dans laquelle l’Union européenne si elle ne réagit pas, se trouverait vite dépassée.
Un cadre règlementaire européen
Le déploiement des systèmes d’intelligence artificielle a fait couler beaucoup d’encre avec les capacités impressionnantes d’applications comme Dall-E et StableDiffusuion capables de générer des photos-montages pouvant conduire à la construction d’infox à grande échelle. Les robots conversationnels comme ChatGPT ont également montré leur capacité à répondre à des problèmes complexes avec une précision frappante, remettant en question notre capacité à savoir si c’est l’Homme ou « la machine » qui avait rédigé ces textes. Cette évolution technologique, en plus d’ouvrir un nouveau marché économique majeur et de remettre en question une large part du fonctionnement de nos modèles sociaux et sociétaux pose aussi de larges questions d’éthiques et de morale. Face à ces bouleversements, une réponse européenne s’avérait nécessaire.
Cette approche de l’UE en matière d’intelligence artificielle s’axe sur l’excellence technologique et la confiance afin de renforcer la recherche et les capacités industrielles tout en garantissant la sécurité et les droits fondamentaux. Cette stratégie européenne de l’IA repose ainsi sur les capacités technologiques de l’Union à devenir un producteur d’intelligence artificielle mais aussi à faire en sorte que cette IA soit centrée sur l’humain et soit digne de confiance.
En avril 2021, la Commission européenne a adressé une proposition de cadre règlementaire sur l’intelligence artificielle au Parlement européen et au Conseil de l’UE. Il s’agissait du tout premier cadre juridique sur l’IA dans le monde. La proposition propose de lister les applications présentant un risque élevé, de définir des exigences claires pour ces applications et des obligations spécifiques pour leurs utilisateurs. Tout système d’intelligence artificielle mis sur le marché européen devra également répondre à un cahier des charges précis permettant d’évaluer sa conformité. Enfin, une double gouvernance : européenne et nationale, sera dédiée à la surveillance des systèmes d’intelligence artificielle et à l’application de ce cadre. Cette approche fondée sur les risques distingue ainsi différents niveaux de risque pour les systèmes d’IA : risque inacceptable, risque élevé, risque limité et risque minimal ou nul conditionnant les règles à suivre pour entrer sur le marché européen.
Le principal défi pour ce cadre règlementaire résulte dans sa flexibilité afin de s’adapter aux rapides évolutions technologiques de l’intelligence artificielle, ainsi, l’UE et les Etats membres auront à exercer un contrôle continu sur les producteurs et fournisseurs de systèmes d’intelligence artificielle.
Une course contre-la-montre
C’est ainsi une véritable course contre-la-montre qui s’est lancée pour mettre en place ce cadre règlementaire pionnier, car la tâche est conséquente, et les institutions européennes ne sont pas tombées d’accord sur l’intégralité de la proposition de la Commission européenne, nécessitant la tenue d’un trilogue. Celui-ci s’est déroulé à Bruxelles, le trois octobre et est parvenu à plusieurs avancées : l’établissement des critères permettant d’identifier un système d’IA à risque d’une part et celui des critères généraux définissant les systèmes d’IA dits « standards » d’autre part, c’est-à-dire ceux dont les applications ne sont pas à risque.
Problème, l’essentiel des discussions notamment afin de rendre le texte flexible et adapté à la progression rapide des technologies d’intelligence artificielle doivent encore se tenir. En effet, plus la définition du texte règlementaire sera précise, plus elle sera inadaptée dès l’apparition d’une nouvelle technologie. Or, les systèmes d’intelligence artificielle commencent à intégrer la vie quotidienne des Européens et l’absence d’une règlementation adéquate pourrait entraîner des conséquences désastreuses. C’est donc une véritable course contre-la-montre qui est lancée entre le législateur européen et les nouvelles technologies de l’intelligence artificielle